Les Gaveurs et les Buveurs

gavageLe foie gras à nouveau banni en Californie Le Devoir 8 janvier 2019

Alain Roy: « Il faut mettre tout ça en perspective : est-ce que mon confort alimentaire, ma tradition, mon goût l’emporte sur la souffrance d’un être vivant qu’on reconnaît susceptible de souffrance selon la science ? »

Une lecture que ne partage pas Rougié. Le producteur de foie gras (de Marieville, en Montérégie) estime plutôt que le stade de « stéatose hépatique », ou « lipidose » du foie, atteint par l’engraissement maîtrisé des canards est « un état réversible et non pathologique », selon les informations publiées sur son site Internet.

Quelle hypocrisie: En réhabilitation on encourage les alcoholiques souffrant de la stéatose hépatique de cesser de boire pendant que c’est encore réversible, avant que ça mène à la cirrhose du foie, la démence, le cancère du foie et la mort.

La production de foie gras grossit le foie jusqu’à 10 fois sa taille normale. Cela entrave la fonction hépatique en obstruant le flux sanguin et dilate l’abdomen, ce qui rend difficile la respiration des oiseaux. La mort survient si le gavage est poursuivi. https://en.wikipedia.org/wiki/Foie_gras#Humane_foie_gras

Jusqu’un certain point la strangulation et même l’égorgement sont réversibles, si on arrête de les faire assez tôt.

Est-ce que dans sa publicité l’entreprise Rougié est en train de prôner la réhabilitation des oies? Pas la peine, puisque les alcoholiques s’empoisonnent de leur propre libre arbitre, tandis que les oies ne se gavent pas volontairement.

(Au moins boire du vin donne du plaisir au buveur — avec ou sans foie gras — mais le gavage ne donne que de l’agonier au gavé, pour le plaisir du consommateur, et au profit des gaveurs de la Montérégie. Est-ce réversible, ça?)

liver cirrhosis

Contre le rodéo NomadFest 2017, Montréal

https://drive.google.com/file/d/0B-MBjIoXNLprWlRDcGlzaVRfY3M/preview

Extraits du code civile du Quebec B-3.1 – Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal

CONSIDÉRANT
—que la condition animale est devenue une préoccupation sociétale;
—que l’espèce humaine a une responsabilité individuelle et collective de veiller au bien-être et à la sécurité des animaux;
—que l’animal est un être doué de sensibilité ayant des impératifs biologiques;
—que l’État estime essentiel d’intervenir afin de mettre en place un régime juridique et administratif efficace afin de s’assurer du bien-être et de la sécurité de l’animal;

Nul ne peut, par son acte ou son omission, faire en sorte qu’un animal soit en détresse.

Pour l’application de la présente loi, un animal est en détresse dans les cas suivants:

—il est soumis à un traitement qui lui cause des douleurs aiguës;
—il est exposé à des conditions qui lui causent une anxiété ou une souffrance excessives.

Toute disposition d’une loi accordant un pouvoir à une municipalité ou toute disposition d’un règlement adopté par une municipalité, inconciliable avec une disposition de la présente loi ou d’un de ses règlements, est INOPÉRANTE.

MA QUESTION: « Face à ce constat, comment est-ce que la ville de Montréal peut faire venir le rodéo de St Tite à notre festival NomadFest 2017? »

(Le maire répond que ça se fait ailleurs aussi (St Tite, Calgary), qu’on nous assure que les animaux ne souffrent pas, qu’il y a des vétérinaires qui sont présent, et que ce qui est important c’est que ça se fasse de façon « professionnelle ». Il promet de m’envoyer des informations supplémentaires à ce sujet.)

QUESTION COMPLÉMENTAIRE: « Est-ce que le maire a jamais témoigner de près ce qui ce fait au rodéo — et est-ce qu’il permettrait faire ça avec ses animaux de famille? »

(Le maire répond qu’il a été voir le rodéo à St Tite, qu’il était satisfait, et qu’il y a une différence entre les animaux domestiques et le animaux de rodéo.)

Le maire semble avoir attendu à ce qu’on l’applaudisse après cette réplique. C’est un indice de la direction que nous devons prendre: Le maire cherche l’applaudissement, il n’aime pas la mauvaise presse, il souhaite être re-élue. Donc il faut lui communiquer — sans rancoeur, tout à fait sang-froid — ce que les citoyens du québéc ont communiqué avec leur manifeste, et ce qu’ils attendent en termes de respect à la nouvelle loi B-3.1

Il faut insister sur une consultation publique, témoignage privilégié de la SPCA de Montréal, témoignage privilégié de l’ordre de vétérinaires, témoignage privilégié des autres métropoles qui ony banni les rodéos, et beaucoup de preuves vidéos des dégâts…

The Decents and the Deplorables in the “Post-Truth” Era of Crowd-Sourced Demagogy

Hilary was only half-right: The Trump supporters were (and are) ALL deplorables, without exception. So are those who voted 3rd-party or didn’t vote. They all share the blame for what’s to come. Only the numerical majority of decents are blameless. Yet they, too, will suffer the consequences of the triumph of the deplorables — as will the rest of the world.

To have voted for a vile, cheap, ignorant and indescribably dangerous con-man like Trump, with eyes open, has no other word to describe it than deplorable. Yes, we now have to try to make the least worst out of this terrible bargain, but to pretend that Trump voters are anything but deplorables is to pretend OJ Simpson was actually innocent because so adjudged by a jury of peers.

We are in the era of crowd-sourced hearsay demagogy (that some are beginning to call “post-truth”).

Unsustainable consumption of animal-based foods in EU: Policy recommendations

Obigate carivores have no choice, to survive. We are not obligate carnivores but facultative omnivores, with a choice. Nonhuman animals not only eat meat, but they kill, hurt, rape, subjugate and steal from members of their own species; so do humans. But we thought the better of it, and outlawed it. So what kind of an argument is it that other animals and our ancestors did it, so it’s alright for us to go on doing it in the special case of meat eating, at a time when it is no longer necessary for our survival or health — and harmful to every sentient being on the planet?

Proposition Montréal: Calèches électriques et sanctuaire urbain pour les chevaux

21 décembre 2016

[English text follows at end]

Maître Zambito,

Tout d’abord, j’aimerais vous remercier pour votre appel téléphonique.

Ensuite, comme convenu, voici une courte liste de mes remarques, qui seront suivies de ma proposition :

1. Ainsi que le précise la Loi B-3.1 sur le bien-être et la sécurité de l’animal, « la condition animale est devenue une préoccupation sociétale ».

2. Le Québec a malheureusement mauvaise réputation en ce qui concerne le traitement des animaux.

3. Pourtant, la signature, il y a trois ans, par plus de 50 000 Québécois, du manifeste Les animaux ne sont pas des choses, manifeste qui a inspiré la loi B-3.1, démontre que cette préoccupation sociétale croissante pour la condition animale est partagée par les Québécois.

4. Pas une société, y compris la société montréalaise, n’est justifiée de tirer fierté de son passé lié au cheval, ni de le célébrer.

5. La façon noble et compatissante d’honorer le patrimoine que nous partageons avec les chevaux serait de nous dissocier de leur exploitation de jadis : nous vivons plus que jamais à l’époque de l’automobile et du transport public; la circulation à cheval et l’assujettissement des chevaux ne sont plus ni nécessaires ni justifiés.

6. Continuer d’exploiter les chevaux, de les stresser et de les exposer aux dangers inhérents à un milieu urbain, même si cela s’inscrit dans la pratique d’une industrie contrôlée, n’est pas un hommage rendu au cheval ni à notre passé commun. Il s’agit plutôt de la pérennisation des abus auxquels nous avons le devoir de renoncer – et auxquels bien des métropoles dans le monde sont en voie de renoncer.

7. Le maire Denis Coderre maintient que les options qui s’offrent à ces chevaux de misère — retraités d’une vie non moins clémente – sont les calèches ou l’abattoir.

8. Mais voilà une opportunité à rendre un véritable hommage au cheval : À l’heure où les voix toujours plus nombreuses s’élèvent globalement pour dénoncer la vie déplorable des chevaux de calèches, Montréal pourrait offrir un redressement digne et décent de nos pratiques — une réhabilitation sensible face à notre passé doux-amer envers nos chevaux. Au lieu d’industrialiser et de perpétuer le métier obsolescent et mal vu des calèches à cheval en milieu urbain, au lieu de construire des écuries pour prolonger la triste vie de servitude de ces êtres sensibles, Montréal pourrait maintenant créer un refuge pour les chevaux à la retraite afin de leur épargner l’abattage et afin de démontrer la compassion et l’empathie des Montréalais et des Québécois envers nos anciens esclaves. À titre d’exemple, les cochers pourraient afficher sur leurs calèches électriques l’emplacement de ce refuge, là où les touristes pourraient aller voir les chevaux et constater le traitement juste et louable que leur auront réservé les Montréalais. C’est ainsi une image moderne et de compassion que les touristes garderont de notre ville et qu’ils communiqueront autour d’eux. Cette image sera le reflet du changement d’attitude des Québécois à l’égard des chevaux, en particulier, et des animaux, en général.

Si le comité juge cette option prometteuse, je me ferai un plaisir de la développer plus avant et d’exposer les fonctions éducatives du sanctuaire urbain proposé, unique au monde, qui donnerait de Montréal et du Québec une image incomparablement plus positive et progressiste, digne de la loi B-3.1. La politique de l’industrialisation des calèches, pour sa part, ne ferait que perpétuer l’image rétrograde et la mauvaise presse actuelles de la ville, les manifestations de protestation et la critique internationale.

Si vous êtes sensible à ma proposition, j’offre mes services pro bono pour l’élaboration de ce sanctuaire urbain, projet auquel je suis sûr que d’autres bénévoles (et des bienfaiteurs) se rallieraient.

Bien cordialement,

Étienne (Stevan) Harnad

Mr. Zambito,

Thank you for your phone call.

As agreed, here is a short list of my remarks, followed by my proposal:

1. As stated in Quebec Civil Code Bill B-3.1 on the welfare and safety of animals, “animal welfare has become a matter of social concern.”

2. Unfortunately, Quebec has a bad reputation in the treatment of animals.

3. Yet three years ago, more than 50,000 Quebeckers signed the manifesto “Animals are not things“, a manifesto that inspired Bill B-3.1, demonstrating that this growing social concern for animal welfare is shared by Quebeckers.

4. No society, including Montreal society, is justified in taking pride in or celebrating its past history with horses.

5. The noble and compassionate way to commemorate the heritage we share with horses would be to dissociate ourselves from their past exploitation: we live in the day of the automobile and public transport; circulation on horseback and the subjugation of horses is no longer necessary or justified.

6. Continuing to exploit horses, stress them and expose them to the dangers inherent in an urban environment, even within a controlled industry, is not a tribute to the horse nor to our shared past. Rather, it is the perpetuation of abuses that we need to renounce – and many of the world’s metropolises are now in the process of renouncing them.

7. Mayor Denis Coderre maintains that the only two options open to these unfortunate horses – who are “retired” from prior lives that were no less kind – are carriage service or the slaughterhouse.

8. But in reality there is a third option, and with it an opportunity to do real homage to both our past and present with the horse: At a time when more and more voices are being raised against the deplorable life of carriage horses, Montreal could offer a dignified and decent alternative — a genuine reform after our bitter-sweet past with horses: Instead of industrializing and prolonging the obsolete and inhumane use of horse-drawn carriages in the urban setting, instead of building stables to extend the servitude of these exhausted retirees, Montreal could now create an urban sanctuary for retired horses to save them from slaughter and to demonstrate the compassion and empathy of Montrealers and Quebeckers toward our former servants. Coachmen could display the location and description of the sanctuary in their horseless electric carriages so tourists from everywhere would know, and could even go to see the retired horses and the decent treatment that Montrealers are now giving them. This is a modern and humane image that tourists will carry back with them from our city, reflecting the change in Quebeckers’ ways with horses in particular, and animals in general.

If the committee considers this option promising, I will be happy to develop it further and to outline the educational functions of the proposed urban sanctuary, unique in the world, which would give Montreal and Quebec an incomparably more positive and progressive image, worthy of of Law B-3.1. The policy of industrializing urban horse-drawn carriages, in contrast, would only perpetuate the retrograde image and bad press of our city today, along with the protest demonstrations and international criticism.

If your response to my proposal is positive, I offer my services pro bono for the development of this urban sanctuary, to which I am sure that other volunteers (and benefactors) too would rally.

Best regards,

Étienne (Stevan) Harnad
Rédacteur-en-chef, Animal Sentience (Sensibilité animale) Éditions Humane Society, United States
Professeur de psychologie, UQÀM, McGill

The Deplorables

Anyone looking for a crystal ball for the coming Trump administration would do well to ‘study Hungary’s record’. And not just for clues about how a rightist strongman can permanently reorder a society and its institutions once it controls the legislature (as Trump and Orban do) and a judiciary (as Orban does and Trump is about to) – but also for how such a politician continues to consolidate power as his policies fail….
— Susan Faludi: Hungary’s sharp rightward turn is a warning to America

[identity deleted]: “I hate to say that this can’t happen in the US, that the Hungarians have a long tradition of oppressive governments and that the US does not; that the Hungarians are used to repressed freedoms of all kinds, and have almost never really had freedom in the way the US has; but after so many instances of “it can never happen”, I am not sure of anything any more.

“I do feel that at least in North America it would take a lot more to do what Orban has done. The traditions of the countries are at opposite sides of the spectrum. It is just as hard for Hungarians to internalise the freedoms that we have, as it would be for us to internalise the oppression that has been their way of life, essentially for centuries.”

My explanation would be different:

1. No one lives for centuries: Each individual’s lifetime experience is what they see and hear during their own life-cycle (including what they are told about past centuries).

2. Hungarians have not been oppressed for centuries; they’ve just kept telling themselves that for centuries. Plenty of eastern European peoples (and peoples elsewhere) have had a much worse time of it than Hungarians, who were on the side of the oppressors during the Austro-Hungarian centuries. But Hungarians have made a culture of feeling sorry for themselves (though not for their victims), and they keep passing it on from generation to generation.

3. I think the real common factor is the mentality of the deplorables; they are all over the planet. Perhaps under 50% in the US. But the majority in Hungary. I could sketch the profile of a deplorable; it’s not very deep: They are not impoverished people but people who are less well off than they were or they feel they deserve to be. And the rest is just about where they lay the blame: immigrants, black people, non-christians (or non-whatever is the home cult), conspiracies, China, liberals. They also claim to blame the rich (though that’s exactly what they want to be, and when they are, they become exactly like the rest; Trump is among the worst of them, though he’s always been well off).

Well the deplorables now have their day (again). But more is at stake than ever in the past. And more damage — permanent damage — can be done by them in a short time than ever before. The worst time to hand the planet over to the deplorables.

The horrors of hell

The horrors of hell. Not for vegans to view. This is for those who are collaborators in this crime of crimes who have the courage to look the agony of their victims in the face. Please share with all decent people. The truth needs to be made known, at last.

https://www.facebook.com/269LIFE.LIBERATION.ANIMALE/videos/1808408879447652/

Les horreurs de l’enfer. Pas à l’intention des véganes. C’est pour les collaborateurs dans ce crime de crimes qui ont le courage de faire face à l’agonie de leurs victimes. SVP partager avec toutes les personnes décentes. Il faut que la véritié soit enfin connue.

Entrevue de Étienne Harnad par Elias Lévy

[English version follows below]
« J’ai profondément honte d’avoir été végétarien pendant presque cinquante ans. Pendant ces cinq décennies, j’ai vécu dans un déni auto-imposé. Quand on me demandait, « est-ce que ça te dérange si nous mangeons de la viande ? », je m’empressais de répondre poliment, « non, je suis démocrate invétéré, vive la liberté ! » Voilà l’exutoire hypocrite auquel j’avais recours pour être poli », nous confie en entrevue le militant pro-animal Étienne Harnad, membre actif de l’Association québécoise pour le droit des animaux (KARA).

Avant de devenir végane, ce spécialiste reconnu en Sciences cognitives n’avait pas confronté le degré de souffrance que l’industrie du lait faisait subir aux vaches. Il rationalisait le problème en se disant :

« Je sais qu’en pratique on fait mal aux vaches pour avoir leur lait, mais contrairement à la viande qu’on ne pourrait avoir en principe sans leur faire de mal, on pourrait en principe avoir le lait sans faire souffrir les vaches. » Aujourd’hui, végane depuis 6 ans, il trouve odieux de s’être dit qu’il profitera du mal en pratique car ça aurait été possible sans mal en principe.

« Une vache, dont la durée de vie est d’environ 20 ans normalement, dit Harnad, est soumise quotidiennement à un processus effroyable d’extraction de son lait qui, après quatre années, rend son organisme débilité et dysfonctionnel. Elle est mise enceinte artificiellement, on lui injecte des hormones et des antibiotiques pour « soulager » les graves infections qui ruinent ses mamelles … On provoque chez elle une angoisse extrême en lui arrachant ses veaux le lendemain de son accouchement pour ensuite les massacrer à leur tour. Et, suite à quatre années d’agonie, on finit par la massacrer elle aussi, une fois devenue complètement invalide et incapable de tenir sur ses jambes. C’est un processus de destruction sans-cœur et impardonnable d’un animal. Ce sera ma honte éternelle d’avoir pendant tant d’années négligé et rationnalisé ces horreurs évidentes. Je n’ai rien appris de neuf : je le savais déjà ; je l’avais su tout au long de ma vie. »

Né à Budapest en 1945, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, Harnad est issu des survivants de la Shoah. Trente-sept membres de sa famille ont été déportés et exterminés dans les camps de la mort nazis. Ses parents sont parvenus à échapper aux nazis en se cachant sous une fausse identité dans une ville hongroise qui passa sous la houlette de la Slovaquie à la fin de la guerre, Rimaszécs. Il avait trois ans quand sa famille émigra au Canada.

Diplômé de l’Université McGill et détenteur d’un doctorat en Psychologie de l’Université Princeton, Harnad est professeur en Sciences cognitives au département de Psychologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il est aussi professeur adjoint en informatique à l’Université de Southampton, en Grande-Bretagne.

Harnad a été le rédacteur en chef de plusieurs publications académiques, dont actuellement la revue scientifique Animal Sentience (Sensibilité animale), publiée par la Humane Society des États-Unis.

À chaque seconde, dit-il, 6 000 animaux terrestres sont tués pour la consommation humaine. Comparativement, deux humains meurent chaque seconde de causes naturelles, rappelle-t-il. Mais, à l’exception du nombre décroissant des cultures de subsistance, ce massacre n’est plus nécessaire à notre époque, ni à la survie ni à la santé humaines.

« L’humanité est arrivée à une situation monstrueuse en matière de traitement des animaux. Nous n’avons pas le droit de devenir les complices silencieux de cet abominable génocide perpétré contre les animaux. Le survivant de la Shoah ne peut tolérer cette situation honteuse et dégradante pour l’humanité. Abandonner les animaux à leur sort funeste, c’est trahir l’une des valeurs fondamentales de l’humanité : l’obligation pour tous ceux qui (ainsi que leurs proches) sont en santé et en sécurité de venir en aide aux êtres sensibles qui ne le sont pas. C’est pourquoi je milite avec acharnement pour la défense des animaux, qui sont les êtres souffrants les plus abîmés sur la terre des hommes. »

Harnad part du principe que « la majorité des hommes ne sont pas des psychopathes » et que lorsqu’ils auront pris conscience du fait que la souffrance des animaux n’est pas seulement horrible mais aussi gratuite, pas nécessaire, leur « sens de la compassion primera avant tout ».

Âgé de 71 ans, Harnad n’a pas mangé de viande depuis l’âge de 17 ans.

« Je suis pourtant en parfaite santé. C’est un mensonge d’affirmer qu’un être humain ne peut pas vivre sainement s’il ne consomme pas de viande. »

En Israël, le militantisme pro-animal compte de plus en plus d’adeptes, souligne-t-il.

« Aujourd’hui, Israël compte le plus haut taux de personnes véganes au monde. Quatre à cinq pour cent de la population israélienne est végane. Par ailleurs, en Israël, les associations défendant les droits des animaux sont parmi les plus actives au monde et organisent régulièrement des manifestations, très médiatisées, devant les principaux abattoirs du pays. »

Par contre, ajoute-t-il, bon nombre de militants pro-animaux israéliens ont opté pour une approche très radicale.

C’est l’activiste juif américain Gary Yourovsky qui a convaincu ses pairs israéliens d’adopter des méthodes de militantisme très musclées pour défendre les animaux. Harnad a des réserves concernant cette approche.

« Gary Yourovsky a maintes fois déclaré : « j’ai honte que les Israéliens et les Juifs, qui ont subi dans leur chair, au cours de l’Histoire, l’atroce expérience d’avoir été traités comme du bétail – quand les nazis les entassaient dans des trains en direction des camps de la mort – continuent, sans la moindre gêne, de manger de la viande, produit d’un « autre génocide » perpétré aujourd’hui contre les animaux ». Harnad poursuit : « Je ne trouve ni juste ni efficace de culpabiliser les Israéliens ou les Juifs en particulier, et surtout pas les survivants de la Shoah. Presque tous les membres de notre éspèce sont les complices dans ce crime des crimes. »

Quel type d’approche Harnad préconise-t-il ?

« Il y a, à mon avis, d’autres procédés moins agressifs pour montrer au public les horreurs indicibles dont les animaux sont victimes quotidiennement. Par exemple, installer dans les fermes d’élevage, les camions transportant du bétail ainsi que les abattoirs des caméras cctv à 360 degrés qui fonctionneraient 24 heures par jour et diffuseraient les vidéos sur Internet. Ces images effrayantes montrant l’abominable souffrance infligée aux animaux auraient sensiblement plus d’impact sur le public que juste les vigiles silencieuses de sensibilisation ou même l’adoption de principes abstraits visant à protéger les animaux, mais sans précisions quant à leur mise en pratique concrète. Les citoyens pourraient alors non seulement rapporter les infractions aux lois actuelles, mais ils deviendraient témoins également des horreurs qui restent permises par la loi. »

Quelle est la position d’Étienne Harnad face à l’épineuse question de l’abattage rituel des animaux ?

« Bien que je sois profondément athée, je respecte toutes les religions, à condition bien sûr que celles-ci ne soient pas nocives et ne causent aucun type de souffrance. Ma position est claire et catégorique : à l’exception des conflits d’intérêts vitaux (c’est-à-dire, de survie ou de mort) il est immoral de tuer ou de faire mal à un être sensible, qu’il soit humain ou animal. Les traditions religieuses qui valorisent les pratiques comme l’esclavage, la mutilation et le sacrifice humain ou animal ne tombent pas sous l’égide de la liberté de culte. Le droit, laïc bien sûr, doit interdire tout ce qui cause la souffrance inutile d’un être humain ou animal. Je ne renie jamais mon identité juive : pour moi c’est une communauté non de foi mais de fatalité, un passé (tragique), un présent et un destin partagés. Mais l’argument qu’on a le droit de causer de la souffrance sous l’autorité de principes soi-disant « sacrés », prescrits dans le judaïsme, le christianisme ou l’islam, n’a aucune validité à mes yeux. »

D’après Harnad, le Québec a fait un pas en avant (mais jusqu’ici un pas purement formel) en matière de protection des animaux.

« Au Québec, en 2013, on a lancé un manifeste pour que le statut des animaux dans le code civil soit modifié, afin qu’un animal ne soit plus considéré comme un « bien » mais comme un « être doué de sensibilité ayant des impératifs biologiques ». La loi québécoise a été changée. Mais malheureusement, cette modification abstraite apportée au code civil québécois est encore insuffisante pour atténuer les souffrances concrètes subies par les animaux. »

En dépit de cette volonté politique, poursuit-il, les gens ignorent toujours ce que signifie concrètement la souffrance infligée inutilement aux animaux.

« C’est pour cela que j’en appelle à un recours aux nouvelles dispositions formelles enchâssées dans la loi québécoise sur les droits des animaux pour contraindre les fermes d’élevage, les camions transportant du bétail et les abattoirs à se doter de caméras cctv qui diffuseront sur Internet les diverses phases de l’abominable processus d’extermination des animaux, pour contrôler tout d’abord si les règlements actuels (inadéquats) sont respectés, mais aussi pour ainsi sensibiliser les citoyens en même temps à l’énormité de l’agonie animale qui demeure toujours cautionnée par la loi actuelle. »


“I am deeply ashamed to have been a vegetarian for almost fifty years. During those five decades, I lived in self-imposed denial. When asked at a meal, ‘Do you mind if we eat meat?’ I hastened to reply politely, ‘No, I am a confirmed democrat, long live liberty!’ That is the hypocritical reply I used, to be polite,” says pro-animal activist Stevan Harnad, an active member of the Quebec Association for Animal Rights (KARA).

Before becoming a vegan, this well-known specialist in cognitive science had not confronted the degree of suffering that the dairy industry inflicts on cows. He rationalized the problem by saying,

“I know that in practice the cows and their calves are hurt to get their milk, but unlike meat, which one could not get in principle without harming them, one could in principle get the milk without causing the cows to suffer.” Today, vegan for 6 years, he finds it odious to have said that it’s alright to benefit from harming in practice because it would have been possible without harm in principle.

“A cow with a normal life span of about 20 yearsis subjected daily to a brutal process of milk extraction which, after four years, leaves her body debilitated and dysfunctional. She is artificially made pregnant regularly, injected with hormones and antibiotics to “relieve” the severes infections that ruin her udder … Forcibly inseminated, she undergoes extreme anguish repeatedly as her calves are torn from her the day after she gives birth, to be massacred in their turn soon after. And, after four years of this agony, she herself is massacred too, once she has become completely disabled and can no longer even stand on her legs. A lifelong process of heartless and unpardonable destruction of an innocent creature. It will be my eternal shame to have neglected and rationalized these obvious horrors for so many years. I did not learn anything new: I already knew it; I had known it throughout my life.”

Harnad was born in Budapest in 1945, at the end of the Second World War, to survivors of the Shoah. Twenty-seven members of his family were deported and exterminated in the Nazi death camps. His parents managed to escape from the Nazis by hiding under a false identity in a Hungarian town that was transferred to Slovakia at the end of the war, Rimaszecs. He was three when his family emigrated to Canada.

A graduate of McGill University and a Ph.D. in Psychology from Princeton University, Harnad is a professor of Cognitive Science in the Department of Psychology at the Université du Québec à Montréal (UQAM). He is also an Adjunct Professor of Computer Science at the University of Southampton, Great Britain.

Harnad has been the editor of several academic publications, including currently the scientific journal Animal Sentience, published by the Humane Society of the United States.

“Every second,” he says, “6,000 animals are killed for human consumption. By comparison, two humans die every second of natural causes. But, with the exception of the decreasing number of subsistence hunting cultures, this massacre is no longer necessary in our time, neither for human survival nor for health.”

“Humanity has arrived at a monstrous situation in our treatment of nonhuman animals. We have no right to become the silent accomplices of this wanton genocide perpetrated against other sentient species. How can a survivor of the Shoah tolerate this state of affairs, so wretched for the victims, so shameful for humanity? To abandon animals to this heartless, needless fate is to betray one of the most fundamental of human values: the obligation of all of us — who (together with our loved ones) are safe, fed, sheltered and healthy — to come all who are not. This is why I am fighting to defend animals, the victims of by far the most human-inflicted suffering on the planet. “

Harnad assumes that “the majority of humans are not psychopaths” and that once they realize that the suffering of animals is not only grotesque but also gratuitous, unnecessary, their “sense of compassion will come to the fore”.

Aged 71, Harnad has not eaten meat since the age of 17.

“I am, however, in perfect health. It is quite simply a lie that a human being cannot live a full and healthy life without eating meat.”

In Israel, pro-animal militancy is becoming increasingly popular, he points out.

“Today, Israel has the highest proportion of vegans in the world. Four to five percent of the population is vegan. In Israel, animal rights associations are among the most active in the world and regularly organize high-profile events in front of the country’s main slaughterhouses.”

“Some Israeli pro-animal activists,” he adds, “have opted for a very radical approach under the influence of the Jewish-American animal-activist Gary Yourovsky, who has advocated rather aggressive forms of militancy to defend animals.” Harnad has reservations about this approach.

“Gary Yourovsky has repeatedly declared: ‘I am ashamed for the Israelis and Jews — who have themselves undergone the unspeakable experience of being “treated like cattle” when the Nazis pressed them onto the trains headed for the death camps – that they nevertheless continue, without the slightest remorse, to eat meat, the product of that ‘other genocide’ being perpetrated against animals today’.” Harnad responds: “I find it neither fair nor effective to lay the blame for the horrors on the Israelis or the Jews in particular — and especially not on the survivors of the Shoah. Almost all members of our species are accomplices in this crime of crimes.”

What approach does Harnad recommend?

“In my opinion, there are other, unaggressive ways of showing the public the truth about the agony inflicted on animals daily. For example, everywhere were animals are bred, confined transported or slaughtered, install 360-degree audiovisual CCTV cameras that operate 24 hours a day and broadcast and store the videos on the Internet to crowd-source public inspection and monitoring by citizens. These terrible images showing the indescribable suffering inflicted on animals could have significantly more impact on sensitizing the public than just conducting silent (or noisy) protest vigils or even adopting abstract legal principles declaring that animals are sentient beings with biological needs that need to be met, but without any details as to how to apply, monitor and enforce the principles in practice. With the online CCTV data, citizens could not only report offenses against current laws, but they would also become witnesses to the horrors that are still being permitted by those laws.”

What is Harnad’s position on the thorny question of the ritual slaughter of animals?

“Although I am profoundly atheist, I of course respect religious freedom — but only on condition that it does not cause the suffering or sentient (feeling) beings. My position is clear and categorical: with the exception of conflicts of vital (that is, life-or-death) interest, it is immoral to kill or hurt a sentient being, human or animal. Religious traditions that call for or allow practices such as slavery, mutilation, or human- or animal-sacrifice do not fall under the aegis of freedom of religion. The law (secular of course) must forbid everything that causes the unnecessary suffering of a human or animal. I never deny my Jewish identity: for me it is a community not of faith but of fate, a past (tragic), a present and a shared destiny. But the argument that one has the right to cause suffering under the authority of so-called “sacred” principles, whether prescribed in Judaism, Christianity or Islam, has no validity in my eyes.

According to Harnad, Quebec has taken a step forward (but so far only a formal step) in the area of animal welfare.

“In Quebec, in 2013, a public manifesto demanded that the legal status of animals be changed from “goods” to ‘sentient beings with biological imperatives.’ Two years later the Civil Code of Quebec was accordingly formally revised to reflect this — but this abstract change in principle alone is unfortunately not enough to alleviate the actual suffering that humans inflict animals.”

“This is why Quebec’s new law needs to be put into practice by requiring all sites where ‘livestock’ is bred, confined, used, transported or slaughtered to stream and store their CCTV data openly on the Web, continuously monitoring all the phases of the abominable process of extermination. This will not only make it possible for crowd-sourced public inspection to ensure that today’s (inadequate) regulations concerning the victims’ ‘biological imperatives’ are being complied with, but it will at the same time open the eyes and hearts of all citizens to the enormity of the animal agony that is still being allowed under current regulations. Then the next step is in the public’s hands.”

Eyes

Gaze into the eyes
of this little someone
whose short, terrified life
of unending suffering
is about to end,

brutally,

and tell me how you can feel sorry for yourself as you munch on your ham sandwich?

Regarde dans les yeux
de ce petit quelqu’un
dont sa vie courte et terrifiée
de souffrance sans répit
est sur le point de terminer,

brutalement,

et dis moi comment tu peux t’apitoyer sur toi pendant que tu grignotes ton sandwich au jambon?

Nézz a szemébe
ennek a kis valakinek
akinek rövid, rémült életének
végtelen szenvedéséi
hamarosan véget érnek,

brutálisan,

s mondd meg, hogyan tudod sajnálni magad, miközbe sonkás szendvicsedet rágcsálod?

(Photo: TorontoPigSave)